August 10, 2011

ELIXIR DE VIE : L’élixir de vie n’est autre chose, selon le Trévisan, que la réduction de la pierre philosophale en eau mercurielle ; on l’appelle aussi or potable. Il guérit toutes sortes de maladies et prolonge la vie bien au-delà des bornes ordinaires. L’élixir parfait au rouge change le cuivre, le plomb, le fer et tous les métaux en or plus pur que celui des mines. L’élixir parfait au blanc, qu’on appelle encore huile de talc, change tous les métaux en argent très fin.

Voici la recette d’un autre élixir de vie. Pour faire cet élixir, prenez huit livres de suc mercuriel ; deux livres de suc de bourrache, tiges et feuilles ; douze livres de miel de Narbonne ou autre, le meilleur du pays ; mettez le tout à bouillir ensemble un bouillon pour l’écumer ; passez-le par la chausse à hypocras et clarifiez-le. Mettez à part infuser, pendant vingt-quatre heures, quatre onces de racine de gentiane coupée par tranche dans trois chopines de vin blanc, sur des cendres chaudes, agitant de temps en temps ; vous passerez ce vin dans un linge sans l’exprimer ; mettez cette colature dans lesdits sucs avec le miel, faisant bouillir doucement le tout et cuire en consistance de sirop ; vous le ferez rafraîchir dans une terrine vernissée, ensuite le déposerez dans des bouteilles que vous conserverez en un lieu tempéré, pour vous en servir, en en prenant tous les matins une cuillerée.

Ce sirop prolonge la vie, rétablit la santé contre toutes sortes de maladies, même la goutte, dissipe la chaleur des entrailles ; et quand il ne resterait dans le corps qu’un petit morceau de poumon et que le reste serait gâté, il maintiendrait le bon et rétablirait le mauvais ; il guérit les douleurs d’estomac, la sciatique, les vertiges, la migraine et généralement les douleurs internes.

Ce secret a été donné par un pauvre paysan de Calabre à celui qui fut nommé par Charles-Quint pour général de cette armée navale qu’il envoya en Barbarie. Le bonhomme était âgé de cent trente-deux ans, à ce qu’il assura à ce général, lequel était allé loger chez lui, et, le voyant d’un si grand âge, s’était informé de sa manière de vivre et de celle de plusieurs de ses voisins, qui étaient presque tous âgés comme lui.

On conte qu’un médecin charlatan apporta un jour à l’empereur de la Chine Li-kon-pan un élixir merveilleux et l’exhorta à le boire, en lui promettant que ce breuvage le rendrait immortel. Un ministre qui était présent, ayant tenté inutilement de désabuser le souverain, prit la coupe et but la liqueur. Li-kon-pan, irrité de cette hardiesse, condamna à mort le mandarin, qui lui dit d’un air tranquille : « Si ce breuvage donne l’immortalité, vous ferez de vains efforts pour me faire mourir ; et s’il ne la donne pas, auriez-vous l’injustice de me faire mourir pour un si frivole larcin ? » Ce discours calma l’empereur, qui loua la sagesse et la prudence de son ministre.

Dictionnaire infernal Par Jacques-Albin-Simon Collin de Plancy